You are here

2e tunnel au Gothard : la sécurité, un argument fallacieux

27 Jan 16
Aline Trede

Les partisans d’un second tunnel routier au Gothard mobilisent en invoquant l’argument massue de la sécurité routière. Mais pourquoi alors ne s’engagent-ils pas contre tous les tunnels bidirectionnels et pour la sécurité des piétons en ville?

Le Gothard n’est pas, et de loin, le seul tunnel routier bidirectionnel à travers les Alpes. Citons par exemple le Grand St. Bernard et le Saint Bernardin en Suisse ou le Mont-Blanc en France. Personne n’a jamais voulu les assainir pour des raisons de sécurité. La Suisse compte plus de 200 kilomètres courants de tunnels routiers d’une longueur de plus de deux kilomètres. Plus de deux tiers d’entre eux sont bidirectionnels. Le volume de camions ou de trafic journalier dans nombre de ces tunnels est moins élevé qu’au Gothard.

L’axe nord-sud ne deviendra pas plus sûr, même si le deuxième tunnel routier au Gothard était construit, pour deux bonnes raisons. Selon le Bureau de prévention des accidents (bpa) il suffirait d’une hausse du trafic de 3% du trafic pour anéantir le gain de sécurité ; or, la Confédération compte avec une augmentation de 40% dans les 20 ans à venir. Deuxièmement, un automobiliste se rendant de Zurich au Tessin devra traverser à l’avenir deux (!) nouveaux tunnels bidirectionnels de sept kilomètres de long le long du lac des Quatre-Cantons. Bizarrement, personne n’a pipé un mot sur la sécurité de ces deux tunnels. 

actif-trafiC soutient les efforts pour améliorer la sécurité routière, pour toutes les usagères et tous les usagers. Le nombre de piétons accidentés ou morts à cause de la circulation ne cesse d’augmenter. Un décès sur quatre dû à la route concerne un piéton (674 piétons décédés et 7009 gravement blessés en 10 ans). Durant la même période, seulement sept personnes sont mortes dans le tunnel du Gothard. Investissons donc dans la sécurité routière là où on obtient le meilleur rapport prix-résultat, à savoir dans les agglomérations, et non sur les autoroutes ! 

Notons encore : les milieux demandant un second tunnel au Gothard pour des raisons de sécurité sont les mêmes qui sinon s’opposent vivement à toute mesure de sécurité, telles que l’abaissement du taux d’alcoolémie ou de la vitesse. La sécurité ne leur sert que de feuille de vigne pour imposer une extension du réseau routier. Or, la construction d’un second tunnel au Gothard ne fera que repousser les goulets d’étranglement vers les agglomérations de Bâle, Zurich, Lucerne et du Tessin, avec à la clef encore plus de gaz d’échappement au Tessin, qui est déjà le canton le plus exposé à la pollution atmosphérique. 

Un second tunnel routier au Gothard rendra cet axe de transit plus attrayant pour les camions, sabotant à terme l’article sur la protection des Alpes et le transfert de la route au rail du transport de marchandises. Tout cela pour plusieurs milliards de plus que ne le coûterait un ferroutage durant la réfection du tunnel actuel. N’oublions pas que le nouvel tunnel ferroviaire de base du Gothard sera inauguré en juin de cette année. Il offrira une alternative attrayante et respectueuse de l’environnement à un second tunnel routier. Autant de raisons qui doivent nous inciter, le 28 février, à dire NON à un second tunnel au Gothard!

Christian Harb